Sonko et Mélenchon ne parlent pas du même phénomène, par Mamadou Sy Tounkara

Lors du passage de Jean-Luc Mélenchon à l’université de Dakar le 16 mai 2024, un débat a vu le jour autour des prises de position des deux leaders sur l’homosexualité. En réalité, tous les deux faisaient référence à deux phénomènes très différents.

Au Sénégal, il y a toujours eu des hommes naturellement efféminés qui parlent, marchent, font des manières comme les femmes; ils préfèrent la compagnie des femmes; certaines femmes préfèrent leur compagnie. Ce phénomène est parfaitement légal au Sénégal; il a toujours été toléré et ils avaient même leurs propres activités (mbaxal et sabar) très attractives.

Mélenchon parle d’un autre phénomène : le mariage pour tous ou la possibilité pour des hommes ou des femmes de se marier entre eux, légalement et civilement, de fonder leurs foyers, d’avoir leurs enfants et de vivre le plus normalement du monde. Il a rappelé être le premier législateur français à l’avoir réclamé, en mai 1990, vingt-trois ans avant la loi Taubira qui le légalise en France en 2013, la même année que le Royaume-Uni.

Les Pays-Bas ont été le premier pays au monde à légaliser le mariage homosexuel en 2001, avant la Belgique en 2003; l’Espagne (2005), la Norvège (2009), Portugal et Islande (2010), Danemark (2012) ont suivi la tendance. Au total, vingt-deux pays européens sur les cinquante que compte le Vieux Continent l’ont rendu légal à ce jour.

Le Canada (2005) et les Etats-Unis (2015) l’ont aussi autorisé.

En Asie, seuls Taïwan (2019) et le Népal (2023) l’autorisent.

Au Proche et Moyen-Orient, aucun pays ne l’accepte.

En Afrique, tous les pays le rejettent à une et seule exception, l’Afrique du Sud depuis 2006.

Les Européens sont, ainsi, les promoteurs et ambassadeurs du mariage homosexuel, en tant que nouvelle valeur née seulement en 2001, trois-cent mille ans après la présence de l’Homo-Sapiens sur terre. Nombre de dirigeants y sont ouvertement homosexuels. Valeur en Occident, anti-valeur ailleurs.

Pour ce qui est du cas spécifique du Sénégal, nous tolérons les hommes efféminés mais non les rapports sexuels entre hommes, encore moins le mariage pour tous. L’homosexualité en tant qu’inversion de la loi historique qui fonde la famille autour d’un homme et d’une femme est illégale et non tolérée dans notre pays. L’article 319 du Code pénal prévoit des peines d’emprisonnement d’un à cinq ans; aucun leader ne songe à le dépénaliser et des députés demandent même sa criminalisation, en 2022. Aucun centre d’état-civil n’ose le célébrer dans notre pays, pour ne pas parler des mosquées ou églises.

Pour le moment, le mariage homosexuel n’a aucune chance au Sénégal car nos us et coutumes, nos religions, nos représentations mentales et sociétales le bannissent.

« Pour le moment », car lorsque l’Occident veut quelque chose, il se donne le temps et les moyens d’y parvenir. Divers ambassadeurs y travaillent dur : individus influents, ONG, pression financière, banalisation.

Il faut de la veille et de la vigilance.

Mamadou Sy Tounkara

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